Le film d'animation
Qui dit film d'animation dit forcément histoire! En à peine deux siècles, il y eut d'abord le dessin animé, puis la pixilation, et enfin l'image de synthèse, pour ne citer que les principales techniques d'animation!
En quelques lignes, et beaucoup d'eau qui a coulé sous les ponts, voici le tour du -petit- monde de l'animation!
Le tout premier film d’animation semble avoir été un film publicitaire réalisé par l’anglais Arthur Melbourne-Cooper, à qui l’on doit également MATCHES APPEAL (1899) dans lequel il animait des allumettes !
Vint ensuite l’américain James Stuart Blackton qui pratique les premières substitutions objets/dessins (THE ENCHANTED DRAWINGS, 1900), et l’espagnol Segundo de Chomon qui anime des objets (EL HOTEL ELECTRICO, 1905).
Mais il faudra attendre 1908 pour voir véritablement à l’œuvre la pratique du dessin animé avec FANTASMAGORIE d’Emile Cohl. Ce court métrage donne à voir l’essence de l’animation, à savoir l’utilisation de dessins successifs qui constituent les phases du mouvement et le principe de la caméra image par image fixée dans un axe vertical.
En 1928, les spectateurs font la connaissance de la plus célèbre créature de l’animation MICKEY MOUSE, né sous le crayon du dessinateur Ub Iwerks, et rendu célèbre par Disney ! Dans WILLIE, LE BATEAU A VAPEUR, Mickey est ainsi un matelot aux ordres du Capitaine Pat Hibulaire, Disney exploitant l’avènement du film sonore pour présenter le premier dessin animé avec son synchrone !
Durant l’âge d’or de Disney, Walt Disney et ses meilleurs animateurs travaillent sans relâche pour produire des dessins animés pour le grand public et créer ce qui deviendra le « maitre-étalon » du genre . En 1937, le studio sort son premier long métrage Blanche-Neige et les sept nains, suivi de Pinocchio (1940), Fantasia (1940), Dumbo (1941) et Bambi (1942).
Chacun d’eux se révèle un événement culturel en lui-même, et est précurseur à sa façon : la combinaison de l’animation et de l’enregistrement stéréophonique dans FANTASIA par exemple, ou bien encore l’équilibre entre moments pleins d’émotion et de grande noirceur dans Pinocchio et Bambi. Et comme le disait le critique C.A LEJEUNE à la sortie de Blanche-Neige : « franchement parfois c’est mal dessiné. Mais je crois qu’il donnera à un plus large public plus de joie que tous les films de sa génération. »
Simultanément, Fleischer Studios, MGM et Warner Bros élaborent un cinéma d’animation international. Fleischer crée la légendaire Betty Boop (DIZZY DISHES 1930) et Popeye (POPEYE THE SAILOR 1933), et MGM se fait connaître en 1940 en utilisant des recettes nouvelles, à l’opposée de la conception dysneyenne.
Le studio donne naissance à Tom et Jerry dans PUSS GETS THE BOOT, pendant que WARNER BROS crée sa marque de fabrique avec Looney Tunes et Merri Melodies. « Le dessin animé américain devient ainsi un champ de bataille, miné par les terriers du lapin Bugs Bunny, retentissant des exploits du pic-vert Woody Woodpecker, traversé par le chat Tom à la poursuite de la souris Jerry ou par le canari Tweety Pie dit Titi fuyant le chat Sylvester, en attendant les aventures explosives de Beep-Beep et de Wile E. Coyote. Seule exception, le flegme affecté, la non-violence destructrice du chien Droopy de Tex Avery ! »
Pendant ce temps, l’Europe s’essaie à copier le cartoon à l’américain. C’est l’Allemagne qui donne le la en 1926 avec LES AVENTURES DU PRINCE AHMED de Lotte Reiniger, adepte de l’animation des silhouettes en contre-jour. Et en angleterre, Len Lye (COLOUR BOX, 1935) et Norman MacLaren (BOOK BARGAIN 1937) dessinent les premiers dessins animés directement sur la pellicule.
Après la guerre, le réalisateur français Paul Grimault devient le chef de file de l’animation à la française caractérisée par la douceur du trait et l’ingénuité poétique du récit. En Europe de l’est, l’école du Zaghreb s’impose grâce à Vastrolav Mimica et Disan Vukotic qui remporte le premier Oscar du dessin animé non américain pour LE SUCCEDANE en 1962.
Les techniques évoluant, le terme « dessin animé » cède la place à celui de « film d’animation » , principalement avec l’arrivée des studios PIXAR et à des films comme TOY STORY qui repose non plus sur des dessins animés mais sur des images de synthèse. Mêlant des sentiments complexes à un scénario intelligent, loin des histoires parfois abêtissantes que l’on croit susceptible de plaire aux enfants, des films comme WALL-E (2008) ou LA-HAUT (2009) s’intéressent à des sujets plus difficiles comme l’apocalypse ou la vieillesse. Dreamworks exploite la figure de l’animal parlant avec MADAGASCAR, et BLUE SKY se fait connaître avec L’AGE DE GLACE .
A la fin des 1990, les spectateurs découvrent les sublimes créations du studio GHIBLI, co-fondé par Hayao Miyazaki et Isao Takahata, avec le succès du conte PRINCESSE MONONOKE (1997) et LE VOYAGE DE CHIHIRO (2001). Enfin en France en 2003, Sylvain Chomet attire l’attention avec LES TRIPLETTES DE BELLEVILLE (2003) une comédie loufoque dessinée à la main, au sujet d’un cycliste disparu et d’un trio de chanteuses de music-hall.
Pour conclure, alors que les techniques des films d’animation mêlent aujourd’hui images animées, image par image, et images générés par ordinateur, convenons avec le réalisateur canadien Norman Mac Laren , que ce « qu’il y a entre les images a beaucoup plus d’importance que ce que l’on voit sur les images ». Et que par conséquent « l’animation est l’art de se servir des interstices invisibles entre les images » !
Catherine Habib Journaliste cinéma