Interviews cultes à découvir!

Qui ne connait pas la chanteuse Yelle? Mais avouez que Yelle en pute pour son premier rôle au cinéma c'est moins commun...dans Une Pute et un Poussin, elle nous montre qu'elle a du talent à revendre! 

Place à Julie Vard'Art!

Le cinéma polonais

    "Quel est le devoir principal de l'artiste face à la réalité polonaise contemporaine" interrogeait Andrzej WADJA le père spirituel de la nouvelle génération de cinéastes insoumis de la Nowa Fala polonaise?

Bien que le cinéma polonais est connu une période faste pendant quatre décennies - de 1955 avec Andrzej WAJDA, MUNK, KAWALEROVICZ, et HAS qui représentent l'école polonaise , suivie par la nouvelle vague formée de Roman POLANSKI et Jersy SKOLIMOWSKI, et du cinéma de l'inquiétude morale avec ZANUSSI  et Krzysztof KIESLOWSKI jusque dans les années 1995-, force est de constater que ce n'est plus le cas aujourd'hui. 

En effet, si l'on évoque cette cinématographie, Polanski, Wajda, Kieslowski, Zulawski, Zanussi ou Agnieska Holland sont généralement cités, mais qui connait Wanda Jukabovska, Stanilaw Rosewicz, Jan Jakub Kolski, Krzysztof Kraube, Philip Bajon, Piotr Szulkin réalisateurs apparus dans les années 1980 ou bien encore Malgorszata Szumowska pour la jeune génération?

Cette renommée des réalisateurs de l'Ecole Polonaise est largement dûe à leur exposition sur la scène internationale, et à leur lien avec l'actualité politique du pays. Si l'on étudie les parentés entre le cinéma polonais et le Festival de Cannes, on peut s'apercevoir qu'elles sont nombreuses. 

Dès 1951, "alors que la production polonaise ne dépasse pas 4 films par an", LA VILLE INDOMPTEE de Jerzy ZARZYCKI est présenté au Festival. C'est ensuite au tour de KANAL, second film du jeune réalisateur Andrej WAJDA d'être récompensé par le Prix Spécial du Jury, marquant la naissance de l'école polonaise et inscrivant la renommée du cinéma polonais au niveau mondial. 

Ajoutons à cela que la cinéma polonais compte deux Palmes d'or à son actif, la première pour L'HOMME DE FER d'Andrzej Wajda en 1981 -film qui succède à L'HOMME DE MARBRE-, et pour LE PIANISTE en 2002 réalisé par Roman Polanski. Sans oublier les quatre Prix du Jury et un Grand Prix, notamment pour TU NE TUERAS POINT de Kryzystof Kiewlowski!  

C'est dire que l'histoire des fillms réalisés en Pologne a non seulement rythmé les différentes vagues cinématographiques du Festival de Cannes, mais qu'elle est plus largement partie prenante du cinéma européen des années 1950 à 1995. Comment expliquer alors le recul de cette cinématographie sur la scène internationale? La disparition du mur de Berlin a -t-il entraîné dans sa chute la vivacité du cinéma polonais? 

Par ailleurs, si l'on se penche davantage sur les deux Palmes d'or obtenues par le cinéma polonais, on remarque que TU NE TUERAS POINT a eu un impact immédiat sur le débat qui avait alors lieu en ce Pologne à ce sujet. Ce film percutant, dont le personnage principal est un jeune délinquant de Varsovie, touche en effet un point sensible. En 1989, un an après la sortie du film, le nouveau gouvernement suspend les exécutions durant dix années. Pourtant le réalisateur se défend d'avoir voulu verser dans le film polémique lorsqu'il décide de transformer en long-métrage l'un des téléfilms  de la série LE DECALOGUE! 

Quant à L'HOMME DE FER de Wajda, qui retrace dans l'urgence et à chaud les luttes de SOLIDARNOSC et la signature des accords de GDANSK, l'oeuvre entraîne un temps son réalisateur dans la vie politique de son pays, la Pologne faisant la une des grands titres avec l'élection de KAROL WOJTYLA comme pape, et la victoire du pouvoir syndical incarné par LECH WALESA.

Au vu des films des générations précédentes, le cinéma polonais apparait ainsi comme un instrument privilégié de la réflexion politique...Comme l'affirme Philippe CARCASSONNE, "Andrezj Wajda puis Krystof Zanussi ont saisi au collet la mauvaise conscience de l'Est. Métaphorique et fiévreuse chez l'un, plus subtile, ferme jusqu'au puritanisme chez l'autre, une égale audace renverse les valeurs du réalisme sociale, et fonde au delà des urgences de l'actualité, un statut inédit de la fiction politique".

Revenons en arrière le temps d'un flash-back numérique...après la seconde guerre mondiale, le cinéma polonais est nationalisé et c'est l'entreprise étatique FILM POLSKI QUI qui regroupe la production, la distribution, les salles de cinéma ainsi que toutes les filières de l'industrie cinématographique. 

En raison du contexte  socio-économique propre aux années 1945, les cinéastes acquièrent un statut particulier, qui se rapproche de celui des écrivains. En 1948, est  créée l'Ecole de LODZ, une institution d'état qui a pour vocation de faire renaitre de ses cendres le cinéma polonais réduit à néant par la deuxième guerre mondiale. Cette école devient bientôt le passage obligé de tout réalisateur polonais qui souhaite maitriser cet art! 

Pourtant en 1955, l'école polonaise rompt avec cet état de fait, en créant des structures de production indépendantes afin de se libérer des pressions commerciales imposées par l'état. Cependant jusqu'en 1989, l'état exerce une certaine forme de censure et conserve un droit de regard sur les oeuvres via leur distribution dans les salles de cinéma du pays. Par exemple L'HOMME DE MARBRE d'Andrej WAJDA a eu beaucoup de mal à être projeté à l'international car l'état en interdisait l'exportation sous prétexte que le film relatait "de façon mensongère une partie de l'histoire de la pologne". Il est vrai que ce film conteste brutalement des décennies d'histoire officielle et ouvre des perspectives nouvelles pour les cinéastes polonais. 

Ce n'est qu'en 2005, que la Pologne se dote d'une nouvelle loi, inspirée en grande partie par la France. L'institut polonais du cinéma (PISF) est alors créé ainsi qu'un fonds de soutien à la production, à la distribution et à la promotion des films à l'étranger. Il est curieux de constater que la moindre exposition du cinéma polonais coincide avec la mise en place de ces aides.

Pour conclure, il est intéressant de s'inspirer de propos avancés par le critique Jean-Luc DOUIN. En effet, celui-çi considère que WAJDA s'inscrit dans la tradition du messianisme de l'artiste qui supplante l'étouffement des institutions politiques légales de son pays". Le critique ajoute de plus que rarement un pays fut plus envahi, morcelé, déchiqueté, que la Pologne. "Et que c'est dans ce contexte qu'est née la fameuse vocation héroïque de la Pologne, et qu'a explosé un romantisme forcené, expression d'une passion orgueilleuse et indéracinable pour la patrie, sursaut artistique visant à combler l'absence d'une vie nationale bâillonnée."

Catherine Habib Journaliste cinéma

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